Le 25 janvier 2011, inspirés par l'exemple tunisien, quelques milliers de jeunes égyptiens manifestent au Caire pour des réformes politiques et sociales. Les jours suivants, le mouvement ne cesse de s'étendre et aboutit, le 11 février, à la chute du Président Moubarak et de son régime. Pendant ces dix-jours de Révolution, le Président prononce trois discours retransmis sur la première chaîne de la télévision nationale. Leur durée approximative est respectivement de 12, 11 et 17 minutes.
Si l'efficacité d'un acte persuasif est mesurée à l'effet d'impact que les arguments produisent sur l'auditoire, nous pouvons avancer que les discours de Moubarak - puisqu'ils ne réussissent pas à calmer les protestataires et ne font qu'attiser le mécontentement populaire - ne sont pas persuasifs. Dans le présent article, nous nous proposons d'analyser ces trois discours et d'en étudier la stratégie argumentative. Un rapide survol du contexte d'énonciation nous permettra de les placer dans la situation de communication dans laquelle ils étaient proférés. L'analyse proprement argumentative des discours nous permettra ensuite de dégager les modalités selon lesquelles les trois composantes classiques de la rhétorique aristotélicienne (ethos, logos, pathos) s'allient pour amener l'auditoire à partager une certaine prise de position. L'examen attentif de leur combinaison nous amènera à déterminer dans quelle mesure la parole du Président peut être considérée comme manipulatoire